C’est le dimanche 14 avril 1946 que Noisy-le-Sec a commémoré pour la première fois l’anniversaire du bombardement du 18 avril 1944.

A cette occasion, une plaque a été inaugurée sur un mur du préau du nouveau cimetière. Rappelons qu’à cette date l’ancien cimetière, dévasté dans sa quasi totalité, n’était plus utilisé. La plaque existe toujours. Il y est inscrit :

« A la mémoire du personnel enseignant et de nos camarades tués au bombardement du 18 avril 1944. Les enfants et le personnel des écoles de Noisy-le-Sec. »

Comme l’ensemble du reste de la ville, les écoles ont été fortement touchées. Le bombardement ayant eu lieu de nuit, les bâtiments étaient heureusement vides de tout élève.

  • l’école Gambetta, 4 morts, la directrice et sa mère, la gardienne et son mari.
  • école Cottereau
  • le groupe scolaire Baudin (aujourd’hui Quatremaire)
  • la maternelle Bayard

ont été les plus atteints.

Le 14 avril 1946, les enfants des écoles et leurs parents  étaient conviés à la cérémonie de dévoilement de la plaque. La chorale de Gambetta avait préparé des chants.

Marie L. se souvient :

 » J’étais donc élève au cours complémentaire Gambetta (actuellement collège) et faisais partie de la chorale sous la direction de Mademoiselle Sicard que, malicieusement, nous appelions « trois demi ».

Nous devions chanter lors de l’inauguration de la plaque et aussi aux cérémonies officielles du souvenir. Lors d’une dernière répétition, mademoiselle Marchetti, excellent professeur et forte personnalité, les anciennes de Gambetta s’en souviennent, mademoiselle Marchetti donc trouve notre interprétation dénuée d’émotion.

« Mesdemoiselles, lorsque vous chanterez, pensez à ceux et celles qui reposent dans ce cimetière. Vous avez certainement côtoyé, connu au moins une de ces personnes. »

Pour la petite histoire, j’avais moi-même une amie Jeanine Louis, avec qui chaque soir au sortir de l’école nous jouions à « je te raccompagne, tu me raccompagnes… » Ce soir du 18 avril, je l’ai raccompagnée pour la dernière fois. Jeanine et sa famille ont disparu dans le bombardement.

Le grand  jour arrivé, après être venues en rangs jusqu’au cimetière, nous voilà rassemblées sous ce préau ouvert à tous les vents.

Est-ce alors le froid, la longueur des discours, l’émotion, une élève, Christiane,  s’écroule évanouie. Bravement nous continuons à chanter mais pour certaines, dont moi, conservons un oeil sur la suite des évènements, chose facile puisque notre place en chorale était derrière les sopranos.Deux « gros bras » du service d’ordre l’allongent sur un des bancs de pierre et mademoiselle Marchetti la flagelle avec une magnifique paire de gants beige clair ! Je m’en souviens d’autant mieux qu’au sortir de la guerre ce genre d’article était plutôt rare !

Et pendant ce temps notre « Camille Sicard trois demi » poursuivait la direction de cete hymne qui commençait ainsi : « Ceux qui pieusement sont morts pour la Patrie... » et qui se terminait par  : « et comme ferait une mère, la voix d’un peuple entier les berce en leur tombeau ».

La chorale sous le préau

Les discours. Henri Quatremaire, maire et, à droite, André Nicolas Lefevre, alors conseiller municipal  ;  il deviendra maire en 1947.