Présent lors de la plupart des évènements heureux et malheureux qui jalonnent la vie, le notaire est devenu le « confesseur » des familles.

Mais qui est vraiment ce notable, comment cette profession a t-elle pris forme au fil des siècles ?

notaire

Avant la Révolution le notaire n’existe pas dans son aspect unitaire, c’est au pluriel qu’il faut en parler. Derrière ce terme se regroupent un garde-note, un notaire seigneurial, un notaire royal, un notaire apostolique…

Nous pouvons nous reporter à la définition de l’Encyclopédie de d’Alembert et Diderot : « le notaire est un officier dépositaire de la Loi publique, qui garde des notes, minutes et actes que les parties passent devant lui. » Ceci peut paraître simple mais en fait l’article s’étend sur 25 pages ! La diversité de la profession est grande.

Il faut distinguer notaire et tabellion. Le notaire est celui qui reçoit et fait la minute de l’acte. Le tabellion est celui qui garde la minute et qui en fait la grosse. La grosse est une copie exécutoire de l’acte.

De plus il y a une distinction géographique entre les notaires du sud de la France et ceux du nord.

Dans le sud de la France les règles du droit civil reposent avant tout sur le droit Romain. Le notaire est assez proche de celui que nous connaissons aujourd’hui.

Au nord c’est le droit coutumier qui s’applique, la fonction de tabellion et de notaire est distincte.

Les principaux notaires sont dits royaux car ils ont une fonction publique achetée à l’Etat, un office. L’ordonnance de Villers-Cotterets de 1539 les oblige à rédiger leurs actes en français.

Les notaires seigneuriaux, dans les grands fiefs, sont nommés par le seigneur. Ils ont un pouvoir limité à leur seigneurie.

Les notaires apostoliques nommés par les évêques ou archevêques. Ils sont en charge d’enregistrer des actes concernant les affaires ecclésiastiques. Cela dure jusqu’en 1691 quand Louis XIV décide de vendre lui même les charges de notaires apostoliques.

A cette époque le notaire peut exercer plusieurs professions à la fois. Il peut être avocat-notaire, procureur-notaire, greffier-notaire.

notaire XVI Quentin Matsys

Peinture du XVIe siècle d’un notaire, par le peintre flamand Quentin Matsys

L’authentification des actes :

On utilise un sceau pour affirmer l’authenticité des actes. Les premiers sceaux apparaissent vers 1210. A Paris, la prévôté royale, le Châtelet, est pourvue d’un sceau propre. Il y était gravé: « Scel aux contrats des notaires de Paris ».

sceau du chatelet

La signature du notaire est suivie d’une ruche. Un terme de paléographie, qui recouvre ce motif souvent décoratif, très personnel à chaque exécutant. La ruche permettait de se distinguer, d’affirmer son habileté à l’écriture tout en certifiant l’authenticité de l’acte, du fait surtout de sa grande difficulté à la reproduire !

A la Révolution la fonction s’unifie avec l’apparition du notaire public en 1791.

Le candidat notaire doit avoir au moins 8 ans d’expérience professionnelle et se soumettre à un examen devant un jury composé de juges et de notaires. Toutefois les notaires en place peuvent continuer leur fonction. Ce n’est que progressivement que le nouveau notariat apparaît.

Il faut attendre le Consulat et la loi de ventôse An XI (16 mars 1803) pour voir apparaître le notariat. Trois catégories de notaires sont définies :

  • le notaire dit de première classe dans les villes les plus importantes disposant d’un tribunal d’appel.
  • Les notaires de deuxième classe plus nombreux, moins prestigieux exercent dans les villes où siège un tribunal de première instance
  • Les modestes notaires de troisième classe se contentent  du ressort d’une justice de paix.

Il est interdit au notaire d’exercer d’autres activités.

Jusqu’au milieu du XXème siècle seule une minorité de notaires passe par l’université. Dans les années 1960, les deux tiers des notaires de France ne disposent pas de la licence en droit.

La formation des notaires se fait dans le cadre d’écoles de notariat. Elles ont un statut officiel dès 1902.

Le notariat contemporain est régi par l’ordonnance du 2 novembre 1945.

De 1958 à 1979 plusieurs réformes étendent le ressort géographique quelle que soit leur commune de résidence

Loi du 13 mars 2000 « adoption du droit à la signature électronique »

2006, minutier central électronique des notaires de France (MICEN) Il se situe à Venelles dans les Bouches du Rhône.

2008, signature du premier acte authentique sur support électronique.

Aujourd’hui les minutes des notaires noiséens ont été dévolues aux archives départementales. Le fonds couvre la période 1601 à 1945.

La devise :

 Le notariat a pour devise « Lex est quodcumque notamus », ce qui signifie : ce que nous écrivons fait loi ». Ce qui exprime la vertu de l’acte authentique car cela signifie que les actes rédigés par les notaires ont force de loi c’est-à-dire force probante et force exécutoire.

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Le panonceau

Le panonceau est apparu au début du XVe siècle, pendant la Guerre de Cent Ans, sous la forme d’un bandeau d’étoffe brodé des armes royales. Il signalait dans une ville la présence de la maison d’un notaire afin que les actes qui y étaient conservés puissent être protégés en cas d’émeute ou d’incendie.

Il est devenu par la suite une plaque de bois ou de métal frappée des insignes du pouvoir politique, tour à tour le lys royal (Ancien régime), l’aigle impérial (Premier et Second Empires) et la Liberté, effigie de la République.

On trouve toujours un panonceau à l’entrée d’un office notarial. Il est aujourd’hui le signe visible de la présence d’un officier public auquel chacun peut s’adresser pour être conseillé et pour établir un acte authentique , revêtu du sceau de l’Etat.

 

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Le gnomon :

La devise des notaires est associée depuis Louis XIV à leur emblème : le gnomon.

Le terme de gnomon est la retranscription littérale du mot grec signifiant « connaître ». A l’origine, il s’agissait d’un simple bâton posé en terre pour calculer l’heure au soleil. Le gnomon a désigné par la suite le cadran solaire à plusieurs faces sur lequel il est planté. Il s’agit d’un cadran solaire donnant l’heure vraie de même que les notaires expriment la vérité et la volonté des parties dans leurs contrats.

C’est l’emblème du notariat depuis Louis XIV : « comme le bâtonnet éclairé par le soleil marque le temps sur le cadran par son ombre, le notaire éclairé par la Loi marque la volonté des parties sur son acte avec la même exactitude ».

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LES NOTAIRES NOISEENS

Je ne vais pas vous donner ici de liste exhaustive des notaires qui se sont succédés à Noisy-le-Sec. Si vous le souhaitez vous pouvez vous reporter à l’ouvrage d’Hector Espaullard qui en dresse une liste complète et détaillée.  Je ne vous parlerai que de quelques uns.

Il faut être fortuné pour s’offrir le prestigieux office de « notaire du Chatelet de Paris » 100 000 livres au milieu du XVIIè siècle, c’est pourquoi nous retrouvons dans cette liste les noms de grandes familles noiséennes.

Espaullard :

– Jacques Blaise Espaullard, notaire de 1679 à 1685, il avait été clerc de Me Nicolas Chauvin, notaire à Noisy-Le-Sec de 1657 à 1668

– Blaise Espaullard de 1685 à 1700 lui succéda. Blaise épousa  Jeanne Cochu. Ils eurent au moins un fils Blaise (prénom identique)

– Blaise Espaullard (fils) de 1700 à 1705.

Cottereau :

– Estienne Cottereau de 1731 à 1768. Il mourut à Noisy-Le-Sec le 2 décembre 1774 à l’âge d’environ 86 ans. Il était le doyen des notaires royaux reçus au Châtelet.

– Denis Cottereau de 1768 à 1774.

– Pierre-Marcel Cottereau 1775 à 1810. Sachez que sous la Révolution, il prit le titre de notaire public pour le département de la Seine. Il fut maire de Noisy-le-Sec en 1791 (rédacteur du cahier de doléances) et de 1800 à 1816.

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Ruche de Maître Pierre Marcel Cottereau

 Il est le dernier des notaires héréditaires et aussi le dernier qui appartint à une famille noiséenne.

Les notaires suivants, s’ils n’étaient originaires de Noisy ont joué, pour certains, un grand rôle dans la vie de notre commune.

Par exemple :

– Joseph Deplace (notaire de 1810 à 1826) qui fut maire de 1816 à 1819.

Deplace notaire

Ruche de Maître Jean Philippe Delacour (1826-1832)

Ruche de Maître Jean Philippe Delacour (1826-1832)

– Adolphe Bizouard (notaire de 1832 à 1846), maire de 1843 à 1848.

– Jacques Honoré Gautherin, notaire de 1858-1865, maire de 1860 à 1864

L’étude du notaire :

A partir de 1846 et jusqu’en 1904, les notaires avaient leur étude rue Saint Denis (bâtiment à l’alignement démoli dans les années 1970).

6 rue Saint Denis l’étude des notaires attestée depuis Me Louis Pierre Genet (1846-1858)

6 rue Saint Denis l’étude des notaires attestée depuis Me Louis Pierre Genet (1846-1858)

Me Chevillard fut le dernier à exercer à cette adresse du 10/11/1898 au 03/08/1904.

1bis rue de la Forge, la maison du notaire Me Chevillard

1bis rue de la Forge, la maison du notaire Me Chevillard

A partir de 1904, l’étude se trouve rue Carnot n°10. A cette adresse il faut distinguer la maison d’habitation du notaire (aujourd’hui au 21 passage Cochu) et l’étude construite en bordure de rue.

A noter que la maison était entre 1903 et 1904 occupée par une école libre de filles en externat. Cette école était tenue par Melle Hechtermann et appartenait à la Congrégation de l’Intérieur de Marie.

Nous ne savons pas exactement de quand datent ces deux bâtiments.

étude me Corpechot notaire

10 rue Carnot Me Corpechot 1904-1943

10 rue Carnot, étude de Me Corpechot 1904-1943

Se sont succédés au 10 rue Carnot :

  • Henri Corpechot, notaire de 3/08/1904 au 09/02/1943. En 1923, c’est lui qui a rédigé le contrat de mariage d’Hector Espaullard.
  • Michel Bossy, notaire de 9/02/1943 à 16/01/1981.  Il avait un associé Yves Bourguet. A noter qu’après le bombardement du 18 avril 1944 , l’étude est momentanément transférée au 11 avenue de Brazza
  • Depuis c’est un office notarial qui a pris sa place Me Dubreuil, Creneau, Jabaud, Bernard et Latour.

Anne-Marie Winkopp

Sources :

  • Chambre des notaires de Paris
  • Les archives notariales, conférence de Guillaume Nahon, directeur des Archives Départementales, le 15 novembre 2014