L’hydrologie d’une région porte sur l’étude :

– des eaux de surface naturelles : cours d’eau (ruisseaux, torrents, rivières, fleuves…) ; eaux de ruissellement ; eaux stagnantes (mares, étangs, lacs…)

– des eaux souterraines : nappes phréatiques ; rivières souterraines ; sources ; puits

– des eaux aménagées : – cours d’eau artificiels (canaux, aqueducs,…),

– transport des eaux : de ruissellement, eaux usées (collecteurs, égouts…) ;

– de l’acheminement de l’eau potable (réseau de distribution)

Qu’en est-il à Noisy-le-Sec ?

Rapide rappel de l’étymologie du nom de la commune : Noisy, c’est le  « Nucetum » des Gallo-Romains, c’est-à-dire lieu planté de noyers (les derniers ont disparu à la fin du 19ème siècle, après les gelées de 1870-1871 et celle de 1889, mais dont le souvenir en demeure dans le blason de la ville, dans le carrefour appelé « rond-point des petits noyers »). Le sec : aucun cours d’eau n’est apparent sur le territoire de la commune. Cela prête à discussion, car ce ne fut pas toujours vrai : des « rus» (petits ruisseaux) bien apparents ont existé par intermittence jusqu’au 19ème siècle.

Pour en revenir au point précédent, il y a à Noisy-le-Sec un cours d’eau artificiel (le canal de l’Ourcq, creusé à partir de 1822, et qui borde le nord de la ville sur 800m environ) ; un aqueduc : de la Dhuys (voir article spécifique), un système de collecte des eaux usées et de ruissellement ( le 1er véritable égout fut édifié en 1845 sous la rue Saint Denis, simple poterie destinée à recevoir les eaux de ruissellement descendant de la colline et qui se déversait dans le ru de Montfort), un réseau de distribution d’eau potable ( à Noisy, l’eau vient de la Marne, via l’usine de traitement de Neuilly-sur-Marne). Citons pour mémoire quelques petites mares autour du fort, qui abritent les fameux crapauds calamites ! Les puits ont toujours été nombreux à Noisy (on en comptait plus de 100 au milieu du 19ème siècle, le sous-sol étant riche en nappes phréatiques : exemple celui foré place publique (future Jeanne d’arc) en 1849 et qui fut surmonté de la 1ère statue de la future sainte.

29 fontaine J d'Arc:princesse

Les facteurs de l’hydrologie. 4 facteurs principaux : climat, relief, géologie, actions humaines.

Le climat : Noisy, comme toute la partie est de l’Ile de France subit un climat tempéré, à la limite du climat océanique et du climat continental, ce qui fait qu’il y pleut modérément (600 ml d’eau par an, moins que la moyenne nationale qui est de 750), mais plus longtemps.

Le relief :

Il y a 2 parties :

  • La pente du plateau qui descend de Romainville, au sud : pente en moyenne de 20% (autour de 110m place Carnot jusque vers 65 m place Jeanne d’Arc), pente faible jusqu’au carrefour rue Jean Jaurès-Bd Gambetta.
  • Le début de la plaine de France qui occupe tout le centre et va jusqu’à la limite nord de la ville (autour de 45 à 50 m au canal de l’Ourcq) et qui occupe tout le nord du département.

buttes témoins

La Géologie :

C’est toute l’histoire géologique du Bassin parisien qu’il faudrait raconter pour expliquer comment se sont formées les couches géologiques que l’on trouve ici : c’est long et très complexe. Pour résumer énormément :

Le sud de la ville appartient au plateau de Romainville-Montreuil-Belleville (car il se termine à l’ouest dans Paris, au niveau des Buttes-Chaumont). Il atteint 130 m au maximum aux Lilas. Ce plateau est ce que l’on appelle une butte-témoin, ce qui veut dire qu’il appartenait autrefois à un ensemble plus vaste : le plateau de Brie, tout comme le plateau d’Avron et le plateau de Montfermeil. On y trouve les mêmes couches de terrain, à la même altitude et possédant les mêmes fossiles. Ce plateau de Brie est l’une des 4 grandes plateformes qui forment la structure géologique du Bassin parisien, les 3 autres étant les plateaux de calcaire grossier, celui du calcaire de St Ouen (ces roches ont servi à la construction des immeubles parisiens) et celui de Beauce. Tous se sont formés par dépôts de sédiments soit marins, soit lacustres pendant l’ère tertiaire.

relief

Après le plissement hercynien qui a formé les montagnes « vieilles » de France (Massif Central, Vosges, Ardennes, Massif Armoricain) et qui forme le socle granitique du Bassin parisien à la fin de l’ère primaire (on trouve du granite à Noisy, mais à 3 km de profondeur !), le vaste golfe marin qui occupait ce centre du bassin a apporté le dépôt de sédiments, qui se sont accumulés comme une pile d’assiettes au cours du secondaire, dont l’immense épaisseur de craie de la période crétacé(-145 à -65 millions d’années), puis à l’ère tertiaire (-65 à -3 M.A.), les transgressions et régressions successives de cette mer ont amené le dépôt de nombreuses couches sédimentaires superposées(sables, marnes, argiles, calcaires, gypse…) : dépôts marins, lacustres ou lagunaires.

Les buttes-témoins dont il est question étaient autrefois couvertes de forêts qui « encerclaient» le fond des vallées dans lesquelles se situaient primitivement les agglomérations ; c’est ainsi que beaucoup de communes voisines furent appelées : Montreuil-sous-Bois, Rosny-sous-Bois, Pavillons-sous-Bois… Il reste aussi le terme « Boissière », lieu couvert de bois et de taillis et qui concerne les villes de Noisy, Montreuil et Rosny. L’urbanisation, le défrichement, l’utilisation du bois comme source de chauffage ont fait disparaitre ces forêts. (Le parc forestier de Coubron est un des restes de l’immense forêt de Bondy très étendue autrefois et qui avait sinistre réputation).

Pour ce qui est de Noisy, la partie géologique qui nous intéresse va du sommet du plateau de Romainville au début de la plaine de France. Voici, très simplifiée, une coupe de terrain qui va du sud au nord, c’est-à-dire partant du niveau de la place Carnot en direction du centre de Noisy. Elle concerne essentiellement les périodes allant de l’éocène au miocène (de – 50 à – 3 Millions d’années), c’est-à-dire la plus grande partie de l’ère cénozoïque (tertiaire). Alluvions, éboulis, limons, déblais ont donné à la fin du tertiaire et au quaternaire l’aspect que nous connaissons.

coupe

L’existence de ces diverses couches de terrain a amené les conséquences suivantes sur l’hydrologie à Noisy-le-Sec :

– il existe plusieurs nappes aquifères dans le sous-sol, dues à l’imperméabilité des argiles et des marnes : la plus importante au niveau de l’argile verte(ou glaise verte), une autre au niveau des marnes infra gypseuses, l’eau d’infiltration ayant traversé les couches de gypse et de sable, perméables. La première a alimenté les deux sources d’Orval et du Goulet. De celle-ci émanait le ruisseau du Goulet, qui suivant le talweg (ligne de plus grande pente), passait autrefois approximativement par la place Jeanne d’Arc, la plaine des Groult et formait alors le « ru de Montfort» à Bobigny, avant de rejoindre la Seine à Saint Denis. Il coulait par intermittence et depuis le 19ème siècle a été canalisé en souterrain. La source d’Orval (s’écoulant vers la place St Martin et le Londeau), ainsi que le ruissellement sur les pentes de la colline, ont alimenté les terrains plus ou moins marécageux à l’origine de l’appellation « longue-eau », à l’origine du mot Londeau. Le ru intermittent formé passant par Bondy (mare à la Veuve) s’appelait ru de Moleret et rejoignait aussi la Seine vers Saint Denis.

fossiles

A gauche : sens d’écoulement des eaux de ruissellement sur les plateaux

A droite : exemples de fossiles et 3 types de gypse.

LES CONSEQUENCES ENVIRONNEMENTALES :

1 – Utilisation des roches : beaucoup ont servi de matériaux de construction : les calcaires grossier et de Saint Ouen (pierre à bâtir des immeubles parisiens), la meulière des plateaux (beaucoup de pavillons du 19ème siècle, à Noisy, par exemple), le plâtre tiré du gypse comme crépi. Mais aussi les argiles et certaines marnes (rappel : la marne n’est pas seulement une rivière mais aussi une roche, mélange d’argile et de calcaire). La plasticité de ces roches en fait des terres modelables (pâte à modeler) : une fois mouillées et pétries, on peut leur donner une forme voulue qu’elles gardent à la cuisson d’où fabrication des poteries, des briques et des tuiles très utilisées chez nous.

platriere de la rue du goulet

 

Le gypse (sulfate de calcium hydraté) perd son eau à la cuisson et devient du sulfate de calcium. Réduit en poudre, on obtient le plâtre : la « prise » du plâtre, mélange de plâtre et d’eau, opération inverse, correspond à la reconstitution de très fins cristaux de gypse.

Sur les pentes des plateaux, dont celui de Romainville, il existe trois couches successives de gypse, appelées masses, séparées par des marnes intercalaires (dans lesquelles on trouve les « fer de lance ») : la masse supérieure, la plus récente est composée de gypse saccharoïde ( dont l’aspect rappelle les cristaux de sucre) et qui fait une vingtaine de mètres d’épaisseur, la masse moyenne, composée de gypse saccharoïde et de gypse pied d’alouette (qui a l’aspect d’empreintes de pattes d’oiseaux) qui fait entre 10 et 12 m d’épaisseur, la masse inférieure, la plus ancienne (1 à 2 m ). Les 2 premières surtout ont été exploitées, d’abord à ciel ouvert, puis par des galeries souterraines (une étude approfondie pourrait en faire l’objet).

Pour mémoire, histoire de beaucoup simplifier, il existe une 4ème masse à certains endroits, jamais exploitée car très mince, ainsi qu’une variété de calcaire très peu importante mais citons la, pour être un peu chauvin : le calcaire de Noisy-le-Sec.

2-Les risques environnementaux :

–        Risques d’effondrement : le gypse est très soluble dans l’eau : la dissolution du gypse par les eaux d’infiltration entraine la formation de grandes cavités dans les masses (voir plus haut la coupe géologique). On les appelle des fontis, qui peuvent subitement s’effondrer. C’est arrivé plusieurs fois, en particulier au niveau du plateau d’Avron, mais cela peut arriver partout. Voici ci-dessous le processus d’évolution d’un fontis.-        Risques d’instabilité des terrains : dus au comblement partiel des anciennes carrières. A Noisy-le-Sec, le risque est peu important.

fontis

A Romainville, par contre, certaines galeries ne sont pas complètement comblées, ce qui pose le problème de l’aménagement de la future « Corniche des forts ».

Risques liés à la plasticité des argiles et des marnes :

Ces roches gonflent quand elles s’hydratent mais, quand elles dessèchent, se fissurent avec le retrait de l’eau, d’où instabilité des sols et glissement de terrains. Les bâtiments en subissent les conséquences (lézardes).

C’est de loin, à Noisy-le-Sec, le risque le plus important (ex : rue de la Chasse).

– Les risques d’inondation fluviale sur les pentes et les infiltrations : cela semble maîtrisé grâce à la construction de bassins de rétention.

En ce qui concerne les constructions, ces impacts sur l’environnement doivent être pris en compte dans la délivrance des permis de construire, et l’établissement des P.L.U. (plans locaux d’urbanisme) successifs.

Jean Bergé

Sources :

– H.Espaullard « Noisy-le-Sec : village heureux, ville martyre »

– Préfecture de Seine St-Denis : PPR Romainville et Noisy-le-Sec

– Wikipédia- BRGM (bureau de recherches géologiques et minières)