L’exposition intitulée Ancien cimetière – Archive de pierre s’est tenue dans l’enceinte de l’ancien cimetière du 16 octobre au 2 novembre 2010.

Le cimetière primitif de Noisy-Le-Sec se situait près de l’église Saint-Etienne, à l’emplacement actuel de l’école Cottereau. Après avoir été désaffecté, le Conseil municipal décide le 6 février 1832 de réserver le terrain pour la création d’une place publique : « l’ancien cimetière placé dans l’intérieur du village face de l’église a cessé depuis près de six ans de recevoir toute inhumation, et que, conformément au règlement sur l’objet il tombe à la disposition de la commune ».

QUELQUES REPÈRES HISTORIQUES

9 mai 1824
Le Conseil Municipal arrête à l’unanimité  » qu’il y a nécessité de transporter le cimetière hors de la commune et le plutot qu’il serait possible « . C’est un terrain appartenant à Mademoiselle Picques au lieudit « Le Champart » qui est choisi. Il faudra attendre 1826 pour que le projet se réalise grâce à un prêt, avec intérêt, consenti à la commune par M. Tripier, ancien maire (paiement du solde des intérêts, délibération du 6 mai 1831).

1832
Le Conseil Municipal décide la plantation de 80 pieds d’arbres. Au-delà de l’aspect esthétique, il y a là une mesure d’ordre sanitaire. En pleine période d’épidémie de choléra, les arbres sont considérés comme un moyen d’assainissement de l’air.

1852 / 1866
Au pied de la croix du cimetière… Le noyau primitif du cimetière correspond à un quasi carré divisé en quatre damiers par deux allées en forme de croix. Au centre de celle-ci s’élevait la croix centrale.

1852
Jean Antoine Testas (22 novembre 1791/ 30 avril 1852), prêtre du diocèse, décédé en son domicile, 18 rue du Goulet. Il est enterré au pied de la croix dans une concession à perpétuité votée par le Conseil Municipal.

1866
Louis Hilaire Duplessis ( ? / 16 avril 1866), curé de la paroisse de Noisy-le-Sec.

7 mars 1920
Le Conseil Municipal décide l’édification d’un monument à la mémoire des Noiséens morts pour la France :  » le monument sera élevé sur la lisière de l’agrandissement prévu du cimetière, en bordure de la clôture qui le séparera de la voie nouvelle allant de la gare à la rue Saint Denis, et dans l’axe de celle également projetée dans l’axe du boulevard Gambetta « . L’architecte communal Jean Barrois établit les plans. La statuaire est confiée au sculpteur Henri Dieupart. La pose de la première pierre a lieu le 11 novembre 1924. Inauguration le 1er novembre 1925.

La fresque est intitulée « L’arrêt de la Ruée ».

18 avril 1944

Au lendemain du bombardement, le cimetière était tellement bouleversé que son abandon fut envisagé. Dans l’attente, les familles furent autorisées :  » à procéder à des inhumations en vue du transfert des corps dans un cimetière d’une autre localité ou de leur réinhumation au nouveau cimetière « . Sur 2 827 concessions : 671 étaient entièrement détruites. 408 très endommagées. 297 endommagées moins gravement. 1 451 restaient en bon état. Les inhumations ont pu reprendre à partir du 6 février 1945.

2009
Création d’un columbarium. En France, l’incinération est légalement permise depuis 1889, cette pratique touche actuellement 25 à 30 % de la population.


MONUMENTS FUNÉRAIRES

Malgré les gros dégâts engendrés par le bombardement de 1944, l’ancien cimetière nous propose deux siècles d’art funéraire et une grande variété de monuments. L’art funéraire suit les modes de l’architecture de son époque. « Chaque tombeau est la demeure d’un mort et l’expression d’une individualité ; mais il est aussi une parole d’adieu adressée au mort par les survivants Š…‹ les vivants expriment aussi quelque chose de leur image. » César Daly, Architecture funéraire contemporaine, Paris 1871.

Les chapelles
La chapelle est organisée comme un édifice religieux avec un chœur séparé de la nef par une marche et un autel adossé au mur. Elle fait écho aux églises  paroissiales où les inhumations sont interdites depuis 1776. Cette construction est dédiée à la famille et non pas au culte. Il ne reste plus que trois chapelles funéraires dont une menace ruine.

Façade richement décorée. Le fronton triangulaire, surmonté d’une croix, est décoré en son centre d’un ange.

L’ange est le messager de Dieu, l’exécuteur de la volonté divine. Les ailes déployées, l’ange peut prendre sous sa protection les personnes dont les identités sont gravées dans l’épitaphe.

Le style néo classique
Ce style réintroduit les formes gréco romaines. Il ne reste que les lourds couvercles (trois) de ces sarcophages dit « à la Scipion ».

Le plan est rectangulaire et le couvercle à deux pentes.

Les frontons triangulaires sont décorés en leurs quatre angles d’acrotères de palmettes.

Le style néo byzantin
Style architectural de la deuxième moitié du XIXe siècle et du début du XXe siècle. Il fut employé notamment dans les édifices publics et religieux ; il recourt, dans la décoration, à la mosaïque. Ici, l’utilisation des tesselles d’or, donne une brillance tout à fait particulière aux autres couleurs (bleu et vert).

L’ALPHA ET L’OMEGA : L’alpha et l’oméga, la première et la dernière lettre de l’alphabet grec, évoquent le passage de la Bible ou Dieu dit « Je suis l’alpha et l’oméga de toute chose. »L’alpha est donc la naissance et l’oméga la mort. Les croyants en la Résurrection estiment que l’alpha succède à l’oméga; c’est pourquoi l’alpha et l’oméga sont aussi associés au Christ. Il s’agit du caveau des sœurs de la Maison de retraite Saint Antoine de Padoue.


Le style néo gothique
Le style néo-gothique inspiré par le mouvement de restauration du patrimoine (Prosper Mérimée et Eugène Viollet-le-Duc), seconde moitié du XIXè siècle.

Les architectes s’inspirent des formes et décors d’un gothique flamboyant du XVème siècle très approximatif, baptisé « à la cathédrale ».


Le style art déco
Caractérisé par des volumes parallélépipédiques aux angles vifs. La sculpture a un répertoire géométrique, très stylisé (ici feuille de laurier dont le feuillage persistant est symbole d’éternité. Depuis l’époque romaine, il est aussi associé à la gloire. L’interpénétration des deux notions peut signifier la gloire éternelle).

L’art déco, période 1920-1939 Le béton armé devient d’utilisation courante. Les formes sont épurées et essentiellement géométriques.

Les Cénotaphes
Un cénotaphe est un monument élevé à la mémoire d’une personne ou d’un groupe de personnes et dont la forme rappelle celle d’un tombeau, bien qu’il ne contienne pas le corps.


LE SYMBOLISME

Le symbole est une représentation imagée d’une notion abstraite. Le symbolisme funéraire peut être révélateur de la personnalité du défunt ou des conditions de sa mort. La « lecture » du symbole peut déterminer la tranche d’âge lors du décès, le sexe, l’état civil, le métier, les options philosophiques et politiques… Toutefois le symbole se lit mais son interprétation n’est point intangible.

L’élément textile est souvent représenté dans le symbolisme funéraire. Il peut suggérer le drap funéraire, le voile, le linge sur lequel Sainte Véronique imprima le visage ensanglanté du Christ. Cet élément, placé sur le pilastre d’entrée, définit la nature du lieu dans lequel nous allons pénétrer.

Le flambeau inversé

La flamme suggère la vie. Elle peut aussi suggérer le souvenir vivace et la transmission, c’est pourquoi une flamme perpétuelle brûle au-dessus de la tombe du soldat inconnu. Contenue dans un flambeau retourné, elle va inexorablement s’éteindre par le manque d’oxygène; ce symbole suggère dès lors la mort. Il peut aussi représenter l’espoir dans la Résurrection, car le flambeau remis dans sa position normale, la flamme rejaillira.

Le flambeau représente l’enveloppe corporelle humaine, et la flamme, l’âme qui s’échappe lors du décès.

Le triangle
Le triangle équilatéral symbolise souvent la Trinité (le Père, le Fils et le Saint-Esprit).

Un œil placé au centre d’un triangle est l’œil de Dieu, qui voit tout et sait tout. Cet œil a la particularité de ne pas avoir de cils. Les nuages figurent les cieux, le paradis. Dans la Bible, les nuées lumineuses marquent la présence de Dieu. Il peut aussi s’agir d’un symbole maçonnique.

Le sablier ailé
Le sablier évoque le passage inexorable du temps; chaque grain de sable pouvant représenter un jour de notre vie. Le sablier comporte des ailes d’ange, messager de Dieu, comme si l’instrument de la mesure du temps devenait, avec le décès, l’âme que l’ange va acheminer au ciel.

Par son côté réversible, le sablier évoque la faculté d’une nouvelle vie si on retourne cet instrument de la mesure du temps.

La couronne
La couronne est symbole d’éternité par le cercle qu’elle épouse, forme sans début ni fin.

Elle peut être constituée de tiges de pavot (sommeil éternel), de laurier ou de chêne (gloire), de lierre (attachement), d’immortelles (immortalité), de pensées (souvenir, libre pensée), de roses (amour), de fleurs variées… La couronne végétale est à la fois, mort et promesse de naissance, par le fait que la tige, arrachée ou coupée, comporte fruits ou fleurs. La couronne mortuaire peut symboliser la promesse de la vie éternelle et la couronne du Christ.

La colonne brisée
La colonne est la vie et constitue une forme particulière de l’arbre de vie, trait d’union entre la terre et le ciel.

Brisée, elle évoque la mort prématurée d’un jeune homme ou d’un homme en pleine force de l’âge (généralement entre 16 et 40 ans) et, plus rarement, la mort prématurée d’une jeune femme; en effet, la colonne évoque aussi le phallus et l’érection.

Le bouquet de rose
La rose est le symbole de l’amour éternel. Le bouton de rose, celui de l’enfance et de l’innocence. Ici il encadrait le portrait du défunt.

L’obélisque
L’obélisque est une survivance du culte préhistorique des pierres dressées.

Monument en forme de pyramide élancée, il est terminé par un amortissement qui remplace la pointe trop fragile que formerait la rencontre des faces.Comme la colonne brisée, l’obélisque symbolise la mort d’un jeune homme ou d’un homme en pleine force de l’âge. Sur la photo, il comporte une corniche débordante à la grecque.

Les grilles de fer forgés délimitant le périmètre de la tombe
La réalisation d’une clôture autour d’une tombe ou d’une partie d’une tombe permet de créer deux espaces distincts : l’espace sacré, à l’intérieur du périmètre ainsi délimité et l’espace public, à l’extérieur. Dans le premier, la pierre tombale et le(s) corps(s) en dessous sont donc sacralisés.

La grille peut être remplacée par des bornes et une chaîne qui les relie.

L’urne
L’urne est, à l’origine, un récipient conçu pour contenir les cendres humaines ou animales. Elle peut être drapée ou surmontée d’un fruit ; dans le premier cas, elle suggère la mort, dans le second elle devient perspective d’une nouvelle vie.

La mise des cendres dans l’urne est interprétée par certains comme le retour au sein maternel.

Les mains unies ou l’alliance
L’alliance est le terme utilisé par les marbriers pour désigner deux mains entrecroisées dont la supérieure est généralement celle d’une femme à l’annulaire présentant une alliance. Ce bijou est un cercle parfait – forme sans début ni fin – qui symbolise la permanence du couple malgré la mort. L’alliance est un anneau et l’affirmation d’un attachement. Les poignets sont prolongés par les manches de vêtements caractéristiques de chaque sexe.

L’alliance symbolise le fait que la mort ne rompt pas les liens du mariage et la certitude que le couple se recomposera avec la mort du survivant ou avec la Résurrection. Ici, présence d’une troisième main, l’interprétation ne pourra se faire qu’après connaissance de l’identité des personnes reposant en ce lieu.